Cette femme s’apprête à le doubler
mai 24, 2013 dans ma vie par Paf
J’ai jamais aimé les gens qui doublent. Et je précise que je ne le fais jamais. Boh à moto, ça compte pas. Et la bande d’arrêt d’urgence à Bordeaux l’été dernier, c’était pour pas louper le train avec les enfants et les valises, ç’aurait été trop chiant. Mais à pied, je veux dire. Quand tu fais la queue, au concert, au ciné, à l’expo, dans les transports… Y’a toujours des margoulins pour passer devant les autres.
T’as la candide, genre “ha vous aussi vous venez récupérer vos vestiaires ?” Oui, nous tous, jusqu’en haut de l’escalier. L’ingénue qui croit qu’on ne lui dira rien au bar parce qu’elle est mignonne. Le veule, qui s’approche de toi qui es en début de file parce que tu es venu une heure plus tôt et qui te demande de lui prendre aussi un truc pour lui. T’as le méchant, qui sait très bien ce qu’il fait, ne s’en cache pas et te défie de son air mauvais de renâcler. De toute façon je ne renâcle pas. Parce que je trouve aussi dégradant de doubler que de faire la grande scène du “nan mé ho fo passgéné !” Tel un bonze, je suis au-dessus de ces turpitudes.
Et chez Mickey ! Putain les queues chez Mickey ! Là, le bonze a le marbre qui fendille. Mickey a inventé la never ending queue : à chaque virage, tu découvres qu’il y a encore la population de la Lozère entre toi et le manège. À chaque virage. Tu verras, tu penseras à moi et à la Lozère la prochaine fois que tu iras.
En fait, même au milieu d’une file de gens qui ne peuvent pas se doubler, j’aime pas. Y’a toujours un relou qui te colle au parechoc. Alors je ne fais pas de grande scène, mais dans la queue pour voir les tableaux d’Hopper au Grand Palais, j’ai dit à un monsieur “est-ce que vous pourriez arrêter d’avancer de 31 cm à chaque fois que j’avance de 30 cm, s’il vous plaît ? Je conçois que par cette température vous tentiez d’adopter la stratégie de l’empereur manchot sur la banquise, mais ça va finir par être inconvenant, pour moi comme pour vous.”
Tout ça pour dire que tous les soirs, à la sortie de l’école, les parents arrivent dans les cinq minutes qui précèdent, attendent gentiment en bas de l’escalier. Et tous les soirs, y’a une mère qui arrive après les autres, se faufile, et monte les marches pour se placer juste devant la porte. Peut-être que sa vie est compliquée, qu’elle montre ainsi à son enfant à quel point il est important pour elle de le retrouver vite, peut-être que ses parents à elle arrivaient toujours en dernier, je ne sais pas. Mais j’aime pas les gens qui doublent.